Denis Liotta : « Nous voulons industrialiser le savoir-faire de Marseille Innovation »
Lorsque l’on a été vice-président en charge du numérique, n’est-il pas finalement logique de (re)prendre les manettes présidentielles ? Depuis juin, c’est donc Denis Liotta qui succède à l’un des fondateurs et piliers de Marseille Innovation, Pascal Fouache. Un passage de relais en douceur et en terre connue mais qui ouvre aussi une nouvelle ère pour le centre européen d’entreprises et d’innovation marseillais. On dira – pour faire terriblement classique – le changement dans la continuité.
Entre Marseille Innovation et Denis Liotta, les liens se sont noués il y a quelques années déjà, lorsque le fondateur de NetAngels cherchait désespérément un lieu pour héberger les startups qu’il accompagne et finance. Le tour d’horizon local lui fait choisir la structure co-fondée par Pascal Fouache et Christian Rey. « Il fallait un lieu capable d’accueillir nos startups. Marseille Innovation avait l’avantage d’avoir une équipe qui suit les jeunes entreprises au quotidien. Nos avons appris à nous connaître. Nous avons fait en sorte que le numérique entre chez Marseille Innovation. L’arrivée du mouvement French Tech en 2014 nous a donné raison« , raconte Denis Liotta. De ce rapprochement naissent des séances de brainstorming qui font naître des idées, testées…
Vitesse supérieure
Mais ça c’était avant. Aujourd’hui, Denis Liotta estime que le CEEI marseillais a le potentiel de pousser davantage, d’aller plus loin. Parce que les chiffres aussi, parlent d’eux-mêmes. Plus de 100 startups accompagnées chaque année, 30 experts et mentors disponibles tous les jours pour répondre aux questions, angoisses, besoins divers. Un taux de pérennité qui atteint 90 % au bout de 4 ans, plus de 6 000 emplois créés et un milliard d’euros de chiffre d’affaires réalisé au cours des dix dernières années…
Et dire que l’aventure a commencé voilà 20 ans. Une époque où le mot innovation était réservé à une certaine catégorie d’entrepreneurs et où le mot startup n’existait pas. « Vingt ans de travail déjà réalisé« , souligne Denis Liotta. Un argument supplémentaire pour passer à la phase supérieure, celle de « l’industrialisation du savoir-faire« .
Car c’est bien cela, la ligne directrice de la nouvelle feuille de route. C’est faire grandir les jeunes pousses, faire des PME, des e-PME. « Tous les projets startups sont devenus des scaleups » pointe le président. « Nous sommes typiquement dans l’attractivité du territoire, toutes ces entreprises qui ont grossi et ont changé de taille ne sont pas parties sous d’autres cieux, elle sont restées ici« . Et il y a aussi cette notion de transmission du virus innovation, Denis Liotta reconnaissant que si lui-même ne s’était pas frotté à la chose, il n’innoverait probablement pas au sein de sa propre entreprise, Mediaco Vrac.
Une mode à suivre
« Je veux que la marque Marseille Innovation se diversifie« , note-t-il. Il y a déjà ce partenariat passé avec Gaaap, l’incubateur installée dans les Hautes-Alpes. Ou avec le CIC pour qui Marseille Innovation agit en tant qu’opérateur. Mais « je ne m’interdis rien« , insiste celui qui fait la différence entre l’entrepreneur qui cherche fortune et celui veut avoir un impact sur la société. Mais surtout, ce qui est la force de Marseille Innovation c’est… l’humain. Et l’équipe de 16 personnes dont Laurence Olivier la nouveau directrice qui prend, elle, la suite de Christian Rey.
A la question « le concept de startup n’est-il pas un phénomène de mode ?« , Denis Liotta répond « que cela ne fait pas de mal et fait s’interroger ETI et grandes entreprises« . Et d’expliquer que « même si un groupe hyper digitalisé, s’intéresse aux startups, il aura toujours besoin d’une personne qui source (les projets innovants NDLR). Aujourd’hui les grands groupes ont peur que les GAFA prennent des parts de marché« . Or, « nous sommes dans un cycle de changement. Le numérique accélère tout ».
Quel conseil donner aux jeunes startupeurs qui se lancent ? « D’abord tester le marché, avoir un retour de ce test et ensuite aller à la levée de fonds« . Et le but c’est la rentabilité. « Cela permet d’investir dans des hommes, des machines, de la R&D… » Présenté comme une étape presque obligée, l’international n’est pas un passage à prendre à la légère, « il faut faire attention, il y a des étapes à respecter« . Et les marchés à privilégier selon Denis Liotta sont l’Amérique Latine et l’Afrique.
Dernier avertissement, « il faut savoir que l’aventure de l’entreprise va être longue. Hormis quelques exceptions, une dizaine d’années est nécessaire pour que la rentabilité soit atteinte, que l’entreprise enregistre du chiffre d’affaires« . Un chef d’entreprise averti en vaut deux…